Marché-institution ou institutions marchandes ?

LONGUEPEE Daniel Par Le 02/03/2022 0

Dans l'ordre libéral

1° Le marché est lui-même une institution. Le marché, c'est un mode particulier de circulation des richesses. Cela signifie qu'il y a des procédures, des pratiques, des habitudes, des lieux précis permettant les échanges, les achats et les ventes : des magasins, des supermarchés, les ventes privées sur le web, bref une continuité temporelle qui structure notre quotidien. Quand on se couche le soir le supermarché était bien là la journée et quand on se réveille le lendemain matin il est encore là ! Des magasins peuvent fermer mais il y en aura d'autres. Il y aura toujours un endroit pour acheter ce que l'on désire. C'est essentiel et tellement essentiel que nous n'y pensons même plus : les acheteurs savent qu'il pourront acheter et les vendeurs savent qu'ils pourront vendre. Voilà pourquoi le marché est une institution, qu'il y ait ou non gain à l'échange. Il s'inscrit dans le temps, il dure et il durera encore demain. C'est ce que rappelle Roger Gusnerie dans L'Economie de marché publié en 2013, les marchés sont « eux-mêmes des institutions ». Les individus à force de réaliser des échanges marchands s'approprient les mécanismes du marché, tentent d'acheter au plus bas et de vendre au plus haut. C'est une seconde nature. Voilà pourquoi les soldes ont du succès ou les ventes privées sur le web. C'est aussi pour cette raison que le passage des anciennes économies soviétiques au capitalisme a pris du temps. Les entreprises ont du réapprendre à recruter, à faire appel aux meilleurs fournisseurs, à maximiser leur bénéfice. Tout cela n'est pas spontané et prend du temps.

2° Le marché a besoin d'institutions. Mais le raisonnement ne s'arrête pas là. « Les marché n'existent pas ex nihilo ». Ils ne tombent pas du ciel. Sur ce point toutefois tous les économistes ne sont pas d'accord. Celui qui est considéré comme le « père fondateur » de l'économie, Adam Smith (1723-1790), partait du principe qu'il existait dans chaque homme « une propension à l'échange et au troc ». Dans ces conditions le marché est spontané et ne semble pas avoir besoin d'expérimentations. Toutefois, et c'est une des dimension importante du marché institutionnel, il faut au minimum pour qu'il y ait échange une reconnaissance mutuelle des propriétés de chacun. Smith l'admettait il faut que les échangistes sachent réciproquement ce qui leur appartient, ce qui appartient à l'autre : « Ceci est à moi, ceci est à toi ». En bref, l'échange a besoin de règles juridiques liés au minimum au respect des propriétés initiales. Il n'y a pas d'échange là où il y a vol et pillage CAD là où la propriété d'autrui n'est pas respectée ! C'est ce que rappelle Guesnerie, l'existence des marchés « dépend elle-même d'un certain nombre d'autres institutions. La première de ces institutions est sans doute l'institution juridique ». Par exemple c'est l'article 544 du Code Civil (Code Napoléon) qui consacre la propriété privée. Parmi les règles juridiques, les brevets jouent un rôle important. Si un inventeur ou un créateur (industriel, artistique, …) n'a aucune protection juridique, CAD qu'il peut se faire copier et diffuser ses idées, il n'aura plus aucune incitation à créer. Il n'y aura plus de marché pour les « choses » nouvelles. Aussi le brevet accorde t-il généralement pour une durée de 20 ans le monopole d'une invention. Une fois le brevet enregistré, l'inventeur peut exploiter lui-même son invention ou la revendre à une entreprise qui l'exploitera. Enfin les règles juridiques définissent aussi ce qu'il est possible d'échanger pas. Il y a l'exemple de l'édit de 1764.  Mais de nos jours par exemple, l'échange de sang ne relève pas du marché mais du don. On ne vend pas son sang, on le donne, en France en tout cas. C'est la même chose pour les organes. On suppose que des règles morales minimales sont nécessaires, ce qui limite l'étendue des relations marchandes, CAD de ce qu'il est permis d'échanger ou pas. D'où tout le débat sur la gestation pour autrui, CAD le principe des mères porteuses. Jusque maintenant, la loi française interdit ce type de pratique. Le risque c'est de créer un véritable marché des bébés, d'où l'image provocatrice dans le dossier : « Mère porteuses. Soldes ! ». Certaines auteurs libéraux extrémistes sont d'ailleurs favorable à un tel marché, comme M. Rothbard. Celui-ci ne reconnaît qu'une seule règle : le respect de la propriété privée. La femme est propriétaire de son corps et donc de ce qui « en sort » comme des bébés. Pourquoi pas les vendre, alors ? 

1° En quoi les soldes illustrent-elles le marché-institution ? 2° Pourquoi la propriété est-elle une institution fondamentale du marché ? 3° Montrez que l'on peut distinguer les notions de « marché comme institution » et d' « institutions nécessaires au marché ».

 

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