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classes sociales

TRAME 2. Comments est structurée la société française ?

Par Le 15/06/2024

1° Parler de structuration sociale n'est pas neutre car cela implique une représentation de la société en termes de groupes sociaux relativement homogènes et cohérents. Par exemples on parlera des ouvriers ou des cadres. Mais quels sont les critères qui permettent de regrouper certains individus dans un groupe et d'en exclure d'autres ? Ces groupes une fois constitués seront-ils égaux ? Ne vont-ils pas être hiérarchisés ? Il est à noter que se placer dans l'espace social—c'est-à-dire dans quelque chose d'abstrait, de symbolique avec des résultats concrets : rouler en Tesla ou en Twingo d'occasion, habiter dans une maison spécieuse avec terrain ou en barre HLM, ...—, c 'est se différencier des autres et être différencié par eux : "que va-t-on faire de ce que les autres font de nous ?", disait le philosophe J-P Sartre. Ainsi dans l'espace social il y des gens "côte-à-côte" mais aussi "en haut" et "en bas" ! 7 grands facteurs de structuration et de différenciation peuvent-être identifiés : la catégorie socioprofessionnelle, le revenu, le diplôme, la composition du ménage, la position dans le cylce de vie, le sexe et le lieu de résidence.

Statut socio-économique : catégorie socioprofessionnelle, le revenu, le diplôme.

Facteurs socio-démographiques : la position dans le cylce de vie, le sexe.

Autres facteurs : la composition du ménage, le lieu de résidence.

2° L'évolution de la structure socioprofessionnelle est intéressante car elle permet d'identifier des processus de long terme :

La salarisation car déclin de l'artisanat, des commerçants, des agriculteurs exploitants, développement de la protection sociale et donc de la protection salariale car le salariat ouvre des droits sociaux (retraites, indemnistés maladies/chômage, ...)

La tertiarisation car développement des services marchands et non marchands : loisirs, banque, éducation, santé, une croissance plus faible des gains de productivité dans les services ce qui enrtaîne un déversement des emplois des secteurs primaire et secondaire où les gains de productivité sont forts dans le tertiaire.

L'élévation du niveau de qualification associée à l'évolution technologique et aux besoins de formation.

La féminisation des emplois car les femmes profitent de la tertiarisation, de l'allongement de la scolarité et plus largement du mouvement d'émancipation qui leur est favorable.

3° Evoquer la stratification sociale est difficile sans aborder un des outils théoriques élaborés pour en rendre compte, à savoir les classes sociales. Deux grands auteurs peuvent alors être distingués, K. Marx (1818-1883) et M. Weber. Commençons par Marx. celui-ci considère que ce sont les forces économiques qui déterminent l'accès aux biens matériels et par conséquent toute la structure sociale. Au centre du système économique, il a les rapports de production, CAD la détention ou non des moyens matériels de la production. Ceux qui les détiennent dominent ceux qui ne les ont pas. C'est une définition objective qui définit la classe sociale. Il y a entre les classes opposées un rapport de domination et d'exploitation. C'est pour cette raison que l'exploitation conduit à la révolte des faibles, toujours plus nombreux. Puisque la production définit des rapports d'exploitation, les classes sociales finissent par s'affronter. Les esclaves d'abord, puis les paysans (les serfs!) et enfin, normalement les ouvriers. Les ouvriers constituent la classe révolutionnaire du système capitaliste. Toutefois la lutte de classes suppose la prise de conscience de classe. Marx distingue en effet classe en soi qui correspond à la place objective dans les rapports de production et la classe pour soi qui forme une unité et défend ses intérêts communs. Par exemple les ouvriers forment des syndicats, font grève et enfin se constituent en parti politique, le parti communiste. L'histoire a toutefois montré que les prévisions de Marx ne se sont pas déroulées comme prévu. Par ailleurs, et Marx le reconnaît, la conscience de classe n'est jamais certaine. Ainsi les paysans ne constituent pas une classe homogène et surtout ils s'allient aux bourgeois plutôt qu'aux ouvriers alors qu'ils subissent le système de la grande entreprise. Pensons aujourd'hui aux paysans qui sont obligés de se moderniser, d'agrandir leur exploitation, de vendre leurs produits à des industries agro-alimentaires comme Daucy ou Bonduelle, etc. De même s'il ne devait rester qu'une seule classe sociale, sûre d'elle même, de ses valeurs, de son style de vie, conscient de son entre-soi, ce serait la (haute) bougeoisie, comme l'indique les sociologues Pinçon-Charlot.

4° Ensuite Weber. S'il utilise la notion de classe sociale il n'en donne pas la même définition que Marx Elle correspond pour lui aux chances différenciées de produire ou d'accéder à des biens et des services. Il distingue les propriétaires comme les chefs d'entreprises, les agriculteurs des non-propriétaires comme les classes moyennes salariées et les ouvriers comme classes sociales. Par dessus tout, Weber élargit la vision unidimensionnelle de K. Marx et ne résume pas la stratification sociale à son élément économique. A côté de l'ordre économique, CAD du critère économique, il y a aussi l'ordre social et l'ordre politique. Ces 3 ordres CAD ces 3 dimensions/critères caractérisent conjointement la stratification sociale. L'ordre social est caractérisé par des groupes de statut CAD par le degré d'"honneur social" ou de prestige que les individus se reconnaissent entre eux. Chaque groupe de statut se distingue par un style de vie et de consommation (éducation, goûts culturels, ...). L'aristocratie et la haute bourgeoisie restent des exemples d'un style de vie à part. Parfois aussi on évoque le style de vie de la "jet set", CAD de ce monde des artistes et vedettes en tout genre qui font la une de la presse "people". Les membres d'un groupe de statut ont la conscience d'appartenir en commun au même groupe du fait du partage des mêmes valeurs. Enfin l'ordre politique caratérise la place obtenu au sein des partis politiques et à la capacité de ces derniers à tenir le pouvoir. Le rôle d'un parti est en effet de conquérir le pouvoir d'Etat.

5° A partir de là, il est loisible de s'interroger sur la pertinence d'une analyse en termes de classes sociales. Plusieurs notions servent à cadrer le débat :

L'évolution des distances inter- et intra-classes :

Hausse de la distance inter-classes : hausse du rapport interdécile, analyse marxiste en termes de lutte de classes, éclatement de la classe moyenne, société en sablier.

Baisse de la distance inter-classes : moyennisation de la société, société en toupie à la Mendras, normalisation de la consommation (société de consommation de masse).

Hausse de la distance intra-classe : Baisse de l'homogénéité des individus au sein d'un même groupe comme au sein de la PCS "employé", ouvriers qualifiés du tertiaire et ouvriers non qualifiés de l'industrie, professeurs et professions libérales (notaire, architecte) au sein des CPIS.

Baisse de la distance intra-classe : Hausse de l'homogénéité au sein d'une catégorie sociale.

Les rapports sociaux de genre : Femmes discriminées sur le marché du travail (temps partiel même si légère diminution récente, plafond et mur de verre, inégalités salariales), patriarcat : double journée de travail.

Les identifications subjectives à un groupe social : Haute bourgeoisie consciente d'elle-même (de ses valeurs, de son savoir-vivre), travailleurs non qualifiés, classe en soi mais pas classe pour soi.

La multiplication des facteurs d'individualisation : Les individus peuvent se sentir privilégié dans un domaine mais discriminé dans un autre et peuvent faire des choix de consommation différenciés. Par exemple emprunter pour acheter un logement ou une voiture d'un statut "supérieur" mais faire des sacrifices dans d'autres postes budgétaires. L'origine ethnique ou le fait de subir une précarisation de l'emploi peut modifier aussi l'appartenance à un groupe social.

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